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Barnabé

Fraternité soliTaire, soliDaire et universelle, un beau morceau d'architecture de Barnabé

Dernière mise à jour : 30 avr. 2021



Vénérable Maître en chaire, et vous tous mes F.°. & S.°. en vos grades et qualités…


« La Fraternité commence seul », avais-je affirmé en atelier d’apprenti, il y une dizaine

d’années, ajoutant que « face au miroir, nous sommes déjà deux ». Un dédoublement qui m’avait alors inspiré les concepts de fraternité soliTaire, soliDaire et Universelle.


Avec un schéma de plus aujourd'hui, suite à un questionnement sur le choix du singulier

plutôt que le pluriel, en rapport avec l’unicité et l’indivisibilité de la République et sa devise ternaire aussi (Liberté-Egalité-Fraternité), suivant le principe d’Unité principielle qui nous est cher.




1. Fraternité soliTaire.


La fraternité soliTaire va de soi à soi, introspective, en un seul lieu : le cabinet de réflexion,

en un seul temps : l’Initiation. Elle va aussi de soi à l'Universel, extravertie alors. Ainsi, ce moment de mon Initiation où j’avais pris le crâne entre mes mains, lui parlant silencieusement comme s'il était la trace d'éternelles présences, liant l'instant au hors temps, lieu clos à l’espace infini.


Autre exemple de fraternité soliTaire : celle qui va de soi à l’autre. Je pense à un second

moment de mon Initiation, quand j’avais pardonné à un proche les tourments qu'il m'avait causé, son silence, son secret. Pardon dont je bénéficierai seul, au milieu de mes proches, de vous, avec vous mes F.°. & S.°., avançant davantage et plus sereinement sur le chemin de la

réconciliation avec moi-même.


Fraternité révélatrice et réparatrice donc, sans qu'il y ait forcément échange entre

personnes physiquement présentes. Car, nous ne sommes jamais seuls. Dès le cabinet de

réflexion, l'esprit fraternel de la Loge veille sur nous deux niveaux au-dessus de nous.




2. Fraternité soliDaire.



Cette fois, ce qui se passe dans le Temple est en un seul temps, un seul lieu, maçons physiquement présents pour apprendre au petit-dernier ses premières

leçons, celles d’une fraternité soliDaire dans la durée.


C’est qu’on ne naît pas F.°. ou S.°. : on le devient, bien qu’ils et qu’elles nous reconnaissent comme tels dès l’Initiation.


Un concentré temporel allant vers un sommet : l'enlèvement du bandeau.


Un crescendo culminant en "coup de foudre" fraternel, solennel, éblouissant, sans

aveuglement. F.°. & S.°. : oui, clones : non. "Tous POUR un" : épées qui protègent. "Tous CONTRE un", épées qui préviennent.


Fraternité est inconditionnelle, sauf trahison au serment.


Fraternité soliTaire et fraternité soliDaire s’imbriquent quand, devant le miroir, nous sommes face à nous-même, quand nous nous confrontons à un second « moi », auquel nous nous relions telle une chaîne d'union à un seul maillon, nos bras enlaçant notre reflet dans la glace en un dialogue intérieur, parrainé par le maçon de l’autre côté du miroir, catalyseur de

l’alchimie symbolique.


Temps alternatif en fraternité soliDaire également, quand la parole circule, quand les apprentis vont du silence au silence, quand compagnons et maitres vont du silence à la parole.


Chacun peut alors participer sans obligation, sans dénégation, dans l'égalité, dans l’écoute et la légalité et maçonniques.


Dans la diversité aussi.


Maillets qui frappent l'un après l'autre, mains qui claquent les unes près des autres, deviennent alors traces audio-visuelles d'une fraternité organisée.


Un exercice de tolérance, où Histoire et Géographie se miniaturisent de façon ritualisée, allant du travail à la récréation, du soleil levant au soleil couchant.


Autre événement marquant (toujours en

fraternité soliDaire) : l'après-Initiation, en salle humide.


Second temps, second "coup de foudre" entre l'enlèvement du bandeau et nos toutes premières Agapes.


Second lieu fraternel, de l'entrée de la salle jusqu'au creux du "U", le "U" initiale d’Universelle.



3. Fraternité universelle.



Nous passons maintenant des temps alternatifs et progressifs au temps unanime,

quand tous ne font qu’Un, que les batteries et saluts à l'unisson affirment avec force nos

valeurs, le prix à payer pour les respecter, les faire respecter. Les valeurs de la

République aussi : la maçonnerie ne se vit pas en vase clos, la fraternité étant

indissociable de la Liberté, de l'Egalité citoyennes.


Autre exemple de fraternité universelle : la chaîne d’union, en "cercle oval", pour

parodier la dénomination de "carré long".


Nous plongeons alors dans un hors temps, un hors lieu, quand une onde d'amour irradie un temps suspendu, un espace infini. Point de montre, ni de boussole.


Extrêmes se touchent, directs, à mains nues, peau à peau, bras enlacés.


Corps noués mais debout ferment l'horloge de nos fraternités, cerclent l'éternel

recommencement, le perpétuel continûment.


C’est à cet instant que, souvent, j’ai levé les yeux, lentement, remonté le fil, du plomb

jusqu'à la voûte et même au-delà.


J’ai aussi quelques fois cherché le maçon céleste à des années-lumière d'ici, celui que j’avais entr'aperçu une nuit, dans une rêverie.


J’en ai même parfois oublié où j’étais, me balançant imperceptiblement du haut du corps jusqu'au retour à l'équilibre, celui de mes F.°. & S.°. redevenu mien. Plusieurs fois, j’ai repensé à mon fils aîné parti au-delà du fil à plomb, à 37 ans, musicien comme son père.


Souvent, imbibé de l’Adagio de Mozart, de son génie, imbibé du texte de Tenue en

tenue, j’ai flotté sur une île étoilée pour un temps de poésie, de fusion et d’effusion où

chaque maçon devient chaîne d'union à un seul maillon, où chaque chaîne d'union devient

maillon de l'Universel.


C’est que nous sommes tous des soliTaires soliDaires.


Des êtres singuliers et pluriels, du plus petit au plus grand, le plus petit à l'image du plus grand.


Dans une fraternité qui n'est pas une fin en soi mais un travail qui éclaire l'autre réel,

s'inspire autant qu’il inspire l'imaginaire de nos proches, ici, ailleurs, dans la cité, dans la

République, dans la Communauté des Nations.


Fraternels dedans pour l'être dehors, pendant pour l'être après, avec ou sans tablier.

Des allers-retours donnant sens et continuité à nos existences, ces lentes contributions

bâties à tâtons entre terre et terre, entre naissance et mort, entre les noirs avant-après

notre vie, avant-après notre existence.



NOTR’ E-XIS-TENC’ : cette flèche entre parenthèses au milieu de deux infinis, où

soliTaires soliDaires, nous fusionnons dans une Fraternité Universelle, y ancrant nos

cathédrales, nos tours de Pise, travaillant inlassablement à ce que l'Humanité tienne

debout, fière, riche de nos fragilités, de nos grandeurs et de notre diversité, afin que

progresse une sage, forte et belle Harmonie en un échantillon d’éternité.


J’ai dit.



Barnabé

 

Commentaire sur la fraternité de Peter Bu :

« Fraternité » et « fraternité »


De nombreuses religions sont fondées sur l'idée de fraternité, mais elle diffère en plusieurs points de la fraternité des francs-maçons:

  • La fraternité religieuse est toujours ''verticale'' car elle relie les humains en tant qu'enfants d'un être supérieur, leur Père.

    • Être issus tous du même père tout puissant est rassurant.

    • La fraternité qui en résulte est fondée sur la soumission à ce père et à ceux qui le représentent. N'appelle-t-on pas les prêtres « père », les fidèles étant leurs « fils » ?

    • Elle est synonyme de l'amour qui, à l’instar des familles de même sang, devrait régner entre les membres des églises.

    • Cette fraternité se limite presque toujours aux seuls adeptes de chaque religion.

    • Certaines églises ont tenté d'imposer leur croyance même aux non-croyants par le feu et l’épée, moyens pas vraiment appropriés pour répandre fraternité et amour...

  • La fraternité maçonnique est ''horizontale''.

    • Elle résulte d'une décision individuelle de percevoir les autres comme ses frères et d'être reconnu à son tour comme leur frère.

    • A priori, l'homme se méfie de tous ceux qui diffèrent de lui. Considérer par un choix volontaire, directement, sans intermédiaire, les autres, tous les autres, comme frères demande un grand effort. La ''méthode maçonnique'' prépare les ''initiés'' à fournir cet effort et leur offre les outils nécessaires.

    • La fraternité qui en résulte est fondée sur la liberté et l'égalité. Elle implique le respect des autres. Les savants et philosophes de l'Académie Royale avaient besoin de ces valeurs pour confronter sans préjugés ni craintes leurs recherches et opinions.

    • Plus que l'amour, la fraternité maçonnique exprime un lien. Il s'agit de comprendre et de ressentir à quel point les humains sont interdépendants à la fois entre eux et avec tout ce qui les entoure. Le caractère viscéral de ce lien pouvait être supposé depuis longtemps, grâce à l'observation de la nature. Au XIXe siècle, la force de ce lien a été prouvée par Darwin, puis confirmée encore plus fermement un siècle plus tard par la génétique et l'écologie. (…)

La fraternité religieuse et la fraternité maçonnique ne s'excluent pas mais elles jouent chacune un rôle différent. Malheureusement, souvent l'une comme l'autre s'arrêtent à la sortie de l'église ou de la loge maçonnique.


Ces deux concepts de la fraternité se rencontrent dans la devise républicaine Liberté, égalité, fraternité. Curieusement, alors que pour les chrétiens comme pour les francs-maçons la fraternité semble primordiale, on l'oublie presque en égrenant la triade des frontons des Mairies et des Palais de Justice.


Dans nos sociétés de domination des uns sur les autres, la liberté et l'égalité sont entravées par

  • les inégalités économiques et sociales,

  • toute sorte de parasites qui s'accrochent à l'échelle des pouvoirs,

  • les idéologies qui justifient leurs privilèges

  • la bureaucratie.

Ces obstacles hissent très haut le mur qui nous sépare de la fraternité. Pourtant, dans notre monde cheminant vers une civilisation planétaire, les trois éléments de la devise républicaine sont d'égale importance.


Peter Bu, extrait du livre « Les francs- maçons arrêtés au milieu du gué ».




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