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La liberté en loge, jusqu'où ?



Etre libre et avoir conscience des atteintes à la liberté en loge

La démarche maçonnique trouve sa crédibilité dans la liberté reconnue à l'initié-e. Cette liberté ne peut s'exercer que dans la mesure où elle s'accompagne du respect de celle que l'autre possède également.


Cette dialectique n'est pas facile à mettre en oeuvre car de nombreux facteurs interviennent :

Ce qui favorise l'exercice de la liberté en loge :

  • l'égalité

  • le respect mutuel

  • la tolérance et la bienveillance

  • l'émulation

  • la valorisation du travail personnel

Ce qui contrarie l'exercice de la liberté en loge

  • la médiocrité

  • la bêtise des psychorigides

  • l'hyper réglementation obsessionnelle

  • la peur

  • l'ambition des honneurs


Deux questions essentielles et existentielles :
Pourquoi ? Comment ?

Quel que soit le moment d’une vie, notre questionnement ne se résumerait-il pas à ces deux interrogations fondamentales ?


Pourquoi vis-je ? Pourquoi suis-je malheureux ? Pourquoi est-il (elle) mort(e) ?


Comment être aimé ? Comment être riche ? Comment être heureux ? Etc.


Selon les cultures, les pays du monde où on se trouve, la religion que l’on nous a inculquée, la formation que nous avons suivie, les questions peuvent différer selon la forme et les réponses peuvent être plus ou moins satisfaisantes.


Il y a celles et ceux qui trouvent des réponses et qui s’en satisfont et il y a aussi les insatisfait(e)s qui papillonnent de réponse en réponse !

Aujourd’hui, les questions qui reviennent sans cesse semblent être : pourquoi cette violence, cette insécurité ? Comment se protéger ? Comment se garantir ? Pourquoi ce chômage et cette pauvreté ? Comment mettre de l’ordre ?


Ne pourrait-on pas convenir que le champ maçonnique apporte plus de réponses au « comment » qu’au « pourquoi » ?

La démarche maçonnique en proposant une méthode, une règle du jeu, des principes et un idéal, mise sur la raison et l’amour pour trouver des solutions : c’est en cela qu’elle est actuelle et qu’elle peut satisfaire un questionnement contemporain.

Le « Pourquoi » n’est pas toujours trouvé dans la réflexion maçonnique et c’est peut-être cela qui explique la nécessaire tolérance et l’indispensable ouverture d’esprit vers l’autre car chacun peut avoir des réponses différentes à ces « pourquoi » !



Libre dans une loge libre : Une formule "wirthienne"

C'est Roger Dachez qui sur son blog rappelle la paternité d'Oswald Wirth ; célèbre auteur maçonnique du XIXème siècle qui inventa cette formule à l'époque où il fréquentait une loge de la Grande Loge Symbolique Ecossaise, obédience connue pour la présence parmi ses membres de nombreux frères à la fibre libertaire.

Il n'empêche que la formule est belle et qu'elle nous renvoie à notre propre responsabilité.

Pour la comprendre encore faut-il revenir à la problématique de la vie en loge:




Exposé de la problématique maçonnique

L'organisation habituelle de la vie maçonnique s'organise à partir de deux échelons organisationnels :

- La loge : c'est la structure de base qui comprend un nombre variable de membres (entre 20 et 100, parfois plus) ; son fonctionnement est très structuré et se déroule suivant un rituel (chaque loge est libre de choisir le rituel qui lui convient). Une dizaine d'officier(e)s ont des rôles définis.

- Les structures obédientielles : les loges ont la liberté de se regrouper dans une structure fédérale, l'obédience, qui prend généralement le nom de Grande Loge (d'autres dénominations sont possibles).

Pour la grande majorité des francs-maçon(ne)s, l'essentiel du vécu maçonnique se déroule au niveau de la loge. Avec l'ancienneté et selon les circonstances, il arrive que le vécu maçonnique concerne aussi la vie obédientielle (c'est à dire le convent, les congrès régionaux, les relations inter-loges).

A tous les niveaux, le fonctionnement des loges et des obédiences n'est pas exempt de problèmes qu'il convient d'aborder avec lucidité pour envisager des solutions crédibles et réalistes.

Dans la grande majorité des cas, les difficultés rencontrées concernent les relations inter-personnelles.

Il y a aussi la question de la difficile adéquation entre un principe de liberté et donc de responsabilité et des obligations de toutes sortes qui ne manquent pas d'émailler le quotidien.

La formule "Etre libre dans une loge libre" ou "Un(e) maçon(ne) libre dans une loge libre" popularisée par Oswald Wirth, auteur maçonnique prolixe de la fin du XIXème siècle et du début du XXème, mérite d'être précisée dans une optique moderne et contemporaine.

La liberté du franc-maçon et de la franc-maçonne est un concept qui s'est rajouté à la tradition maçonnique dans le contexte du développement de la référence aux Droits de l'Homme et du Citoyen.

Cette notion de liberté complète la notion de "devoirs maçonniques" qui , il faut bien le dire, est appliquée de façon très variable selon les loges.

La liberté n'a de sens que dans le cadre du projet maçonnique qui vise l'amélioration de "l'Homme et de la Société".

La liberté pour le franc-maçon (et la franc-maçonne) n'est pas chose facile mais pour la loge, c'est encore plus difficile car les contraintes obédientielles entraînent, par essence, une limitation de la liberté des loges, car celles-ci ont besoin d'une obédience qui soit capable de jouer son rôle.

Pour comprendre, deux préalables peuvent apporter une aide :

  • avoir un aperçu des différents espaces dans lesquels se positionnent à un moment ou un autre le ou la franc-maçon(ne) ,

  • et s'imprégner de la dimension morale que l'on doit toujours faire prévaloir, l'altruisme.



Les espaces du parcours maçonnique : 7 et plus

Lorsqu’on a une certaine expérience de la vie maçonnique, on peut différencier au moins sept espaces dans lesquels se retrouvent, à un moment ou à un autre, les sœurs et les frères :

  • L’espace des temples : et d’abord le temple de la loge mère et ceux que l’on visite ; le temple c’est la loge elle-même avec sa décoration, les parvis, la salle humide et pour les grands temples, d’autres salles. C’est naturellement l’espace le plus fréquenté par tous, celui que l’on découvre quand on change d’orient. Chaque temple a sa personnalité et il y en a qu’on aime plus que d’autres.

  • L’espace des intellectuels : c’est d’abord l’espace des bibliothèques maçonniques, des salons du livre, des librairies ; on y trouve un univers d’idées généreuses qui a été florissant à l’époque de l’Europe des lumières au XVIIIème siècle ; on y fait toujours référence aujourd’hui car de grands noms de la philosophie, de la science et des arts s’y sont intéressés et c’est toujours valorisant. C’est un espace non organisé fréquenté par les individualités au gré des recherches personnelles ; c’est dans cet espace qu’on rencontre des expressions athéistes et anarchistes qui détonent parfois ! On a parfois l’impression aujourd’hui que les intellectuels maçons s’intéresse plus aux recherches historiques et bibliographiques qu’à d’autres thèmes.

  • L’espace des obédiences : c’est un l’espace d’un univers organisationnel : les sièges des obédiences, les congrès régionaux, les convents et les manifestations de prestiges où les staffs obédientiels doivent être présents ; les obédiences fonctionnent comme des institutions avec des règlements, des références historiques et un mode électif indirect qui secrètent une caste intermédiaire ; chacun peut entrer dans cet espace, mais pour y avoir une place il faut du temps, de la patience et une bonne connaissance des procédures et des pratiques ; le langage tient une place très importante car c’est un espace où la maitrise du verbe en impose ; comme dans toute institution, il y a des strates de pouvoirs : loges, régions, convent, conseil de l’ordre et grande maitrise pour quelques uns ! Le mode de fonctionnement oblige à l’immobilisme et au conservatisme et il faut des personnalités exceptionnelles pour pouvoir imposer un changement !

  • L’espace des rites : c’est un espace parallèle aux obédiences avec une logique qui leur est propre : le langage y est un peu différent, et la progression se fait selon les degrés de chaque rite pour accéder à un pouvoir plus feutré ! Bien que les rites cherchent à faire référence à un certain ésotérisme, leur sociologie concerne un public différent, plus traditionaliste et pragmatique.

  • L’espace des réseaux : ils sont divers et variés aussi bien par leurs tailles que par les sujets qui les justifient ; chaque réseau a sa spécificité : professionnels, affaires, politiques, syndicales, associatives, religieux, ethniques, mystiques ou autres ; les réseaux peuvent être formels ou informels , sur la base de fraternelles ou non ; les réseaux fonctionnent souvent par référence à une personnalité de sorte que leur vitalité est très variable selon les époques et les circonstances ; la francafrique en est un exemple parmi d’autres, sûrement pas le plus valorisant , avec une fraternelle et d’autres organisations plus ou moins formelles ! Les réseaux sont souvent à la base du recrutement maçonnique : par exemple les camarades de parti, de syndicats, de club d’affaires, ou de cabinets ministériels sont bien souvent contactés par leurs « collègues » pour entrer dans une loge, où leur entrée se passera généralement sans aucun problème ! L’espace des réseaux est très particulier car sous le couvert d’un langage maçonnique, l’objectif est toujours intéressé : de la constitution de carnets d’adresses aux recherches de passe-droits en passant par des offres commerciales, sans parler de la recherche d’informations « sensibles » !

  • L’espace ésotérique : ils concernent des sœurs et des frères intéressés par un approfondissement de ce que l’on appelle les « sciences traditionnelles » que cela soit, par exemple, l’astrologie, l’occultisme, la kabbale, le tarot, le martinisme avec son spiritisme ou les pratiques magiques ; à titre d’exemple, le martinisme, très prisé par les sœurs, semble influencer un courant non négligeable mais qui souhaite rester dans une certaine discrétion ; en Afrique, l’investissement ésotérique dans l’espoir d’avoir la possession de pratiques magiques est une forte motivation d’adhésion.

  • L’espace de l’intendance : c’est un espace plus intimiste : en dehors du temple ce sont les locaux techniques, les cuisines, les réunions techniques pour veiller à tout remettre en ordre ; chaque loge fonctionne un peu comme un club de rencontres avec ses habitué(e)s, ses pratiques conviviales et son tempérament ; dans cet espace, seul ce qui concerne la vie de la loge importe ! le vernis de la pratique maçonnique est bien sûr présent mais en fait ce n’est pas le plus important ! Cet espace ne concerne qu’une faible proportion de frères ou de sœurs mais ce sont généralement les piliers de la loge : ce sont eux (elles) qui se chargent de l’intendance et des questions pratiques ; ils(elles) assurent la pérennité de la loge et sont parmi les plus assidu(e)s !


Ces espaces s’interpénètrent bien évidemment selon les périodes des vies et des vécus des frères et des sœurs. Dans le contexte d’une population âgée, la baisse de vitalité joue un grand rôle et si l’espace obédientiel attire plutôt les 40-60 ans, celui des rites concerne plutôt les tranches d’âges supérieures !

Et puis, il y a sûrement d’autres espaces dont on pourrait parler et en particulier :

  • l’espace des lieux publics, comme les bars et cafés tenus par des frangin(e)s où on a plaisir à se retrouver au hasard d’un pot,

  • l’espace des solitaires : ils (elles) ne sont pas très exigeantes, sont plutôt discret(e)s et conformistes, en gardant une certaine distance par rapport aux événements ; leur initiation maçonnique n’est pas l’essentiel de leurs vies et leur participation est variable en fonction des circonstances ; ils constituent la franc-maçonnerie « profonde » qui est plutôt légitimiste et sans passion !



La démarche maçonnique : un apprentissage de l’altruisme

A la question « Etre initié(e) ça vous a apporté quoi ? » les réponses les plus fréquentes semblent être :

  • J’ai appris à être plus tolérant(e)

  • Je suis plus posé(e) quand je prends la parole en public

  • Je me suis fais des relations, des amis sincères

  • J’ai découvert des sujets d’intérêt que je ne connaissais pas

  • Mes proches me trouvent changé(e)


Il y a un autre domaine qui pourrait être mis en avant : c’est l’apprentissage de l’altruisme.


L’altruisme, que l’on définit comme une « disposition bienveillante à l’égard des autres, fondée sur la sympathie » n’est pas quelque chose d’inné dans une société où dès le plus jeune âge, nous sommes éduqués à la confrontation, au « combat pour la vie » , à l’utilisation de toutes les « ficelles » pour soutirer un avantage ou une prébende.


Les religions parlent de l’altruisme mais le plus souvent c’est uniquement pour leurs membres. L’apprentissage de l’altruisme en loge dépasse les limites du temple car il s’applique à notre charisme.


L’altruisme ne se décrète pas car il suppose de nombreux changements de comportements :


  • D’abord, apprendre à écouter l’autre : ce n’est pas si facile, surtout si on a l’impression d’entendre le début d’une histoire qu’on a déjà entendue ou si ce qu’on écoute est truffé d’erreurs manifestes ou de contresens. Et pourtant, il faut écouter sans réagir jusqu’au bout car c’est une marque de respect de l’autre.

  • Apprendre à ne pas critiquer pour le plaisir conscient ou inconscient de démonter une argumentation : la critique n’a aucun intérêt si elle en reste à un stade négatif ; nous ne sommes pas obligés d’être d’accord à partir du moment où on accepte de partager des valeurs, une démarche, un mode de relation.

  • Apprendre à ne pas convaincre : tu penses ainsi, je pense autrement mais cela ne nous empêche pas de dialoguer car nous ne souhaitons ni lun ni l’autre convaincre notre vis-à-vis ! Qu’importe les opinions différentes pourvu que nous acceptions tous de transformer ce monde qui par certains côtés nous déplait ; qu’importe la voie choisie, si cet(te) initié(e) m’accepte avec ma différence !

  • Apprendre à comprendre la souffrance de l’autre : souffrances le plus souvent cachées, parfois honteuses, mais qui expliquent de nombreux comportements et de nombreuses opinions. Un individu ne se résume pas à une déclaration d’intention sur des sujets philosophiques ; celle-ci prend sa source dans un vécu et le travail maçonnique peut aider à exprimer ce vécu !

  • Apprendre aussi à ne pas vouloir avoir raison devant les autres ; cette humilité est difficile à acquérir car on a toujours tendance à vouloir se justifier ou à se révolter devant ce qu’on considère comme une ineptie.

  • Enfin, comprendre qu’il faut laisser le temps faire son œuvre, qu’aucune échéance ne justifie de vouloir trouver une réponse à tout sans tarder ! OK, faisons le constat que nous n’avons pas le même point de vue et puis nous en reparlerons un peu plus tard !

Tout cet apprentissage, on peut le faire en loge :

  • Combien de débats stériles pourraient être évités !

  • Combien de débuts de querelles intestines se dégonfleraient avant de faire leur triste besogne !

  • Tout serait plus simple !


L’altruisme c’est bien sûr une vertu de paix mais c’est plus encore : c’est une véritable nourriture cérébrale qui apporte à la pensée une puissante stimulation pour offrir à notre fonctionnement organique une réelle harmonie et une vraie sérénité.


Vivre l’altruisme c’est donc aussi s’assurer un retour personnel qui nous aidera à vivre mieux.


La démarche maçonnique nous aide à développer nos sentiments altruistes pour nos sœurs et nos frères mais aussi pour tous les êtres vivants que nous rencontrons ; en ce sens, elle est exceptionnelle. Sans prosélytisme, nous pouvons apporter aux autres un témoignage exemplaire du bien fondé notre démarche.





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