Deux communiqués (voir ci-dessous) pour défendre la liberté d’expression et peu de signataires ; ainsi pourrait-on résumer les réactions des obédiences maçonniques françaises à l’attentat perpétré par un « terroriste » le 25 septembre 2020 à l’encontre de deux personnes ayant eu le malheur de se trouver devant l’ex siège du journal « Charlie Hebdo », rue Nicolas-Appert à Paris 11ème arrondissement.
Il y a eu le communiqué signé par quatre obédiences maçonniques (GLFF, GODF, GLDF et GMF) et le président de la fraternelle parlementaire, et celui du Droit Humain International.
Le communiqué de presse signé par trois obédiences maçonniques et le président de la fraternelle parlementaire me semble très courageux : en faisant un distinguo entre la liberté d’expression et « les injures ou attaques personnelles contre une personne ou un groupe de personnes en raison de leurs appartenances religieuses ou de leurs origines », ce communiqué montre nettement la spécificité maçonnique qui associe liberté et respect. On pourrait regretter qu’un autre distinguo n’ait pas été fait entre liberté d’expression et liberté de la presse, car la presse bénéficie d’une liberté d’expression totale qui autorise aussi les excès sous réserve du respect de la loi en particulier en matière de diffamation.
Le communiqué de presse du droit Humain reprend les antiennes connues sur la liberté d’expression sans y apporter une originalité particulière.
Au total seules cinq obédiences maçonniques se sont positionnées sur ce sujet. De nombreuses obédiences maçonniques françaises ne se sont pas associées et sont restées dans l’ombre de l’attentisme.
Sur un sujet fondamental pour le « Vivre ensemble », comme la liberté d’expression, les obédiences maçonniques apparaissent encore une fois comme divisées ce qui est regrettable !
Il faut sauver la franc-maçonnerie pour qu'elle n'apparaisse plus divisée !
Communiqué des quatre obédiences maçonniques et de la Frapar :
Le 23 septembre, à l’initiative de Riss, directeur de la publication de « Charlie Hebdo », plus d’une centaine de médias français ont publié une lettre ouverte à leurs lecteurs et à nos concitoyens pour défendre la liberté d’expression.
Les obédiences et structures maçonniques signataires entendent répondre à cet appel et exprimer leur soutien et leur solidarité aux journalistes et aux citoyens menacés de mort sur les réseaux sociaux et dans l’espace public, à l’instar de Zineb El Rhazoui et Marika Bret. La pensée que l’on puisse mourir ou être menacé pour des idées est inacceptable et doit le rester, en France et ailleurs, aujourd’hui comme demain.
Dans nos sociétés traversées par les tensions et les épreuves, nous avons conscience que la liberté d’expression est à la fois la condition de la démocratie et la garantie de toutes les autres libertés. Comme le rappelle régulièrement la Cour européenne des droits de l’homme, l’exercice effectif de cette liberté implique naturellement des mesures positives de protection physique, mais aussi de créer un environnement favorable à la participation aux débats publics de toutes les personnes concernées, leur permettant d’exprimer sans crainte leurs opinions et idées, même si elles peuvent paraître irritantes. La construction de cet environnement incombe évidemment à l’Etat, mais aussi à l’ensemble des citoyennes et des citoyens. Pour paraphraser Charb, la liberté d’expression doit être utilisée par ceux qui ont les moyens de s’en servir.
C’est parce qu’elle est essentielle au débat démocratique et à la vitalité de la nation que la liberté d’expression vaut aussi pour les idées qui heurtent, choquent et inquiètent, ainsi que l’exigent les principes de pluralisme et de tolérance qui s’imposent avec force à une époque caractérisée par la coexistence de nombreuses croyances et confessions au sein de la nation, selon la belle formule des juridictions françaises.
La liberté d’expression concourt ainsi à l’intérêt général et doit être fermement distinguée des injures ou attaques personnelles contre une personne ou un groupe de personnes en raison de leurs appartenances religieuses ou de leurs origines, de telles injures étant inacceptables et pénalement répréhensibles. Le pluralisme et l’altérité ne sont pas des obstacles mais des enrichissements au bénéfice de chacun, et c’est pourquoi la liberté d’expression concerne tous les citoyens, de toutes les origines, de toutes les conditions, de toutes les croyances.
Face à la terreur et à la peur, qui s’opposent à la lucidité et à la rationalité, l’exercice de la liberté d’expression est enfin le creuset permettant de redéfinir les liens qui nous unissent, en faisant face concrètement aux défis et aux réalités de notre temps, afin de toutes et tous nous retrouver dans une même République, juste et fraternelle.
Jean-Philippe HUBSCH, Grand Maître du Grand Orient de France Pierre-Marie ADAM, Grand Maître de la Grande Loge de France Édouard HABRANT, Grand Maître de la Grande Loge Mixte de France Marie-Claude Kervella-Boux, Grande Maîtresse de la Grande loge Féminine de France Christophe-André FRASSA, Président de la Fraternelle Parlementaire
Communiqué du Droit Humain International
La multiplication des menaces proférées sur les réseaux sociaux ou à l’occasion de « tags » sur les murs de nos cités , les violences physiques contre ceux qui veulent simplement s’exprimer, les assassinats récents de journalistes et d’opposants dans certains pays illustrent une montée de l’intolérance et la mise en cause d’un bien conquis de haute lutte au cours de notre histoire : la liberté d’expression, principe clé de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, ayant valeur constitutionnelle depuis 1958 et également garantie par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Les intolérants ou fanatiques de tout poil, éventuellement inspirés par de soi-disant considérations religieuses, par des idéologies totalitaires ou par les circonstances économiques ou sociales créent un climat de crainte voire de peur, étouffant peu à peu la simple expression des divergences, des pensées originales et … finalement la simple contradiction. La liberté d’expression est remise en cause même dans des pays démocratiques.
C’est un processus qui tend à s’imposer et contre lequel chacun doit résister. Sous les violences et les menaces, les citoyens, les journalistes peuvent se résigner au silence, à l’auto-censure. Dans le même temps, les propos racistes, homophobes, antisémites se font plus nombreux et plus véhéments, leurs auteurs se sentant « autorisés » voire légitimés à exprimer leur haine sans retenue.
Les Francs-maçons de l’Ordre Maçonnique Mixte International LE DROIT HUMAIN, partagent l’inquiétude des défenseurs de la liberté d’expression. L’histoire récente nous a montré où un tel climat pouvait mener. Les horreurs qui en ont découlé doivent rester gravées dans notre mémoire collective.
Nous sommes d’indéfectibles défenseurs de l’absolue liberté de conscience et d’expression, piliers de la Laïcité. A ce titre, nous sommes solidaires du cri d’alarme, inédit dans notre histoire, de près d’une centaine de médias français, toutes opinions confondues. Cet appel, auquel nous nous associons, s’adresse aux pouvoirs publics pour un respect strict des lois qui régissent notre pays mais aussi à tous nos concitoyens, conscients que liberté d’expression et LIBERTÉ sont indissociables.
La tentative d’assassinat sur des journalistes à Paris ce 25 septembre nous convainc encore un peu plus de l’urgence de notre engagement.
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